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Réflexion

Retour de la pensée sur elle-même dans le but d'examiner plus en profondeur une idée, une situation ou un problème.

Sisyphe



31 août 2005


Mieux vaut imaginer Sisyphe heureux...

« Sisyphe est connu surtout pour s'être montré assez malin pour déjouer la Mort elle-même. Quand son heure fut venue et qu'elle vint pour le chercher, il l'enchaîna de sorte qu'elle ne put l'emporter aux Enfers. S'apercevant que personne ne mourait, Zeus envoya Arès délivrer la Mort. Mais Sisyphe n'avait pas qu'un seul tour dans son sac et il avait préalablement instruit son épouse de ne pas lui faire de funérailles adéquates. Ainsi, il put convaincre Hadès de le laisser repartir chez les vivants pour régler ce problème. Une fois revenu à Corinthe, il refusa de retourner parmi les morts. La Mort (où même Hermès, selon certaines traditions) dut venir le chercher de force.

Pour avoir osé défier les dieux, Sisyphe fut condamné à rouler éternellement une pierre jusqu'en haut d'une colline alors qu'elle redescendait chaque fois avant de parvenir à son sommet, tel que raconté dans L'Odyssée. Toutefois, Homère ne faisait pas mention de la raison de ce châtiment. Certaines traditions justifient cette punition par la réputation de brigand et de malfaiteur que Sisyphe avait acquise de son vivant. »
(Extrait de http://fr.wikipedia.org/wiki/Sisyphe)

De l'absurde naît souvent la révolte. L'homme peut dépasser l'absurdité de son destin par sa lucidité et sa révolte tenace contre sa condition. Il y a une grandeur à vivre et faire vivre l'absurdité et comme la révolte est la contraire de la résignation, l'homme révolté (comme l'entend A. Camus) empêche de perdre courage et ouvre des portes vers l'espoir. (le "je me révolte, donc nous sommes")

Comme le souligne Albert Camus dans son roman philosophique le Mythe de Sisyphe, Sisyphe représente l'ultime héros absurde. Il sait qu'il n'arrivera jamais au sommet de la montagne, mais juste le fait de lutter, de pouvoir exister, lui donne une raison de recommencer l'ascension.

Malgré l'absurdité de la vie humaine, au sens de l'absence de finalité apparente du monde et de la condition humaine, la vie vaut la veine d'être vécue. Il suffit pour cela d'imaginer Sisyphe heureux!


Et l'Oscar revient à...



22 août 2005


« Par moments, la vérité apporte moins qu'elle ne devrait. Mais tu auras toujours la mémoire des choses. » (Hartigan, personnage du film Sin City)

Mes dernières lectures



18 août 2005


Les livres que j'ai lus durant l'été : (15)

Voltaire - Candide ou l'Optimisme
Friedrich Nietzsche - L'Antéchrist suive de Ecce Homo
Paulo Coelho - Veronika décide de mourir
Anthony Burgess - L'orange mécanique
Boris Vian - L'Écume des jours et L'arrache-coeur
Milan Kundera - L'insoutenable légèreté de l'être et L'ignorance
André Kaspi - Les Américains (2 volumes) et Les États-Unis d'aujourd'hui : mal connus, mal aimés, mal compris
Matthew Pearl - Le cercle de Dante
Dan Brown - Le code Da Vinci (version illustrée)
Machiavel - Le Prince
Thomas More - L'Utopie

La raison



16 août 2005


Dans un sujet précédent (Qui a raison : Descartes ou Pascal ?), j'ai exposé l'opposition classique entre Descartes et Pascal, soit entre la raison et les sentiments. J'y ai terminé ma réflexion en concluant que la meilleure façon d'envisager la vie est celle envisagée par Pascal, c'est-à-dire d'éviter de retirer à la raison toute confiance ou, au contraire, de ne se fier qu'à elle en prétendant qu'elle peut offrir une base solide à nos jugements. En fait, je crois plutôt que la meilleure façon est d'adopter une position médiane : il faut se servir autant des enseignements de Descartes que de ceux de Pascal. Ainsi, je vais résumer au meilleur de mes connaissances le concept du doute méthodique de Descartes.

« Et j'avais toujours un extrême désir d'apprendre à distinguer le vrai d'avec le faux pour voir clair en mes actions et marcher avec assurance en cette vie. » (Descartes, Discours de la méthode)

Descartes est le philosophe français le plus connu et c'est aussi celui qui a ouvert la grande aventure de la pensée moderne en prônant l'utilisation de la raison à son paroxysme, c'est-à-dire que pour lui la raison est le seul guide valable que nous devons utiliser dans la conduite de nos actions. Descartes déclare : « je ne sais rien » lorsqu'il termine ses études au collège, c'est un doute de déception puisqu'il n'a pas trouvé la certitude dans les livres et il a voyagé, mais il n'a pas non plus trouvé la certitude dans la vie. Le sceptique fait du doute une fin en soi, alors que Descartes l'utilise comme un moyen pour parvenir à la vérité. C'est ainsi qu'il élabore sa philosophie du doute méthodique en acceptant pleinement le principe du rationalisme moderne dont il en est, par ailleurs, le fondateur.

De prime abord, il veut tirer toute vérité de la méditation du moi sans recourir à aucune aide externe, ni de l'autorité, ni de la tradition et ni de l'objet d'expérience. Ensuite, il applique le doute méthodique en concluant que si je doute, en effet, c'est que je pense et douter que l'on pense est une contradiction de terme puisque nécessairement si je doute c'est que je pense. Certes il est possible qu'un Dieu trompeur me fasse croire que je doute (le doute va ici jusqu'à porter sur lui-même), mais s'il me fait croire quelque chose c'est encore que je pense (même de façon erronée) et, par là même, que j'existe.

Il est arrivé de la sorte à cette phrase célèbre « Cogito ergo sum » qui est en réalité plus complexe : « Je suis, j'existe, est nécessairement vraie, toutes les fois que je le prononce, ou que je le conçois en mon esprit. [...] Je ne suis donc, précisément parlant, qu'une chose qui pense [...] C'est-à-dire une chose qui doute, qui conçoit, qui affirme, qui nie, qui veut, qui ne veut pas, qui imagine aussi et qui sent. » (Descartes, Méditation seconde.)

Cette phrase célèbre paraît d'une logique enfantine de nos jours, mais en la replaçant dans le contexte de l'époque, on remarque que c'était une déduction sensationnelle. Il espère découvrir dans ses recherches les secrets de la nature avec une clarté et une précision égale à celles d'un théorème géométrique, cependant avec cette méditation il est arrivé à quelque chose de fort simple, que bon nombre d'individus auraient pu conclure, mais qui signifie beaucoup. Comme je pense, cela implique obligatoirement que j'existe et c'est la première certitude que Descartes a pu déduire. Ainsi, quelqu'un raisonnant de la sorte est qualifié de nos jours d'esprit cartésien puisqu'il se base uniquement sur sa raison lorsqu'il fait face à une situation où il se doit de faire un choix.

Descartes fut le premier homme de science à formuler une philosophie accordant la primauté à la raison humaine. Être ou ne pas être signifie-t-il alors être ou ne pas être rationnel ? Descartes considère que la raison est présente en chacun de nous et que nous pouvons tous construire la science vraie à condition de bien utiliser notre raison. Descartes ne rejette pas, a priori, les passions de l'âme, mais selon lui il faut « s'en rendre tellement maître et de les ménager avec tant d'adresse, que les maux qu'elles causent sont fort supportables, et même qu'on tire de la joie de tous. » (Descartes, Les Passions de l'âme.)

Finalement, nous faisons souvent cet appel à la rationalité, présentée comme source nécessaire et incontournable de la connaissance, en condamnant un autre monde perçu comme inférieur ou dégradé : celui des instincts, des émotions, des sentiments, de l'affectivité, bref le monde du cœur. Cependant, en voyant toujours la nécessité – puisque nous sommes des êtres de raison – de soumettre ce monde du vécu à la lumière de la raison, n'avons-nous pas tendance à désavouer sans réserve ni nuance ce monde du vécu ? Devons-nous absolument choisir d'être cartésien ou d'être romantique ?

Nous pouvons facilement reconnaître le Descartes ou le Pascal qui sommeille dans chaque être humain. Apprenez à vous connaître (connais-toi toi-même - Socrate). Choisissez la philosophie de vie qui vous convient le mieux. Pour ma part, je crois que les enseignements de ces deux philosophes français peuvent nous servir dans nos vies quotidiennes.

Que se serait-il passé si...?



15 août 2005


À maintes reprises durant notre vie, nous nous interrogeons sur ce qui se serait passé si... « Vivre au présent », « il fallait bien que tu choisisses », « tu ne peux vivre toute ta vie avec des si », voilà des aphorismes qui traduisent bien un idéal de sagesse. Cependant, dans notre réalité quotidienne, nous cohabitons avec la part de l'autre (comme le titre de l'excellent roman d'Eric-Emmanuel Schmitt). La part de l'autre, c'est la personne que nous aurions pu devenir si tel événement avait été différent.


Le 8 octobre 1908, Adolf Hitler est recalé de l'École des Beaux-arts de Vienne. Que serait-il arrivé si, cette minute-là, le jury avait accepté et non refusé Hitler. Cette minute-là aurait changé le cours d'une vie mais aussi celle du monde.`

[...]
« Les yeux rougis, ses parents lui expliquent avec douceur qu'ils savaient que ce film serait dur à supporter mais qu'ils tenaient à ce que l'enfant le voie.

- Ça c'est réellement passé. C'est notre histoire politique.

- « Alors, c'est donc ça, la politique, pensa l'enfant, le pouvoir qu'ont les hommes de se faire autant de mal? »

- Mais cet Hitler, il était fou, n'est-ce pas?

- Non. Pas plus que toi ou moi...

- Et les Allemands, derrière, il n'étaient pas fous non plus?

- Des hommes comme toi et moi.

Bonne nouvelle! C'est donc une rude saloperie d'être un homme.

- Qu'est-ce qu'un homme? reprit le père. Un homme est fait de choix et de circonstances. Personne n'a de pouvoir sur les circonstances, mais chacun en a sur ses choix.

Depuis ce jour, les nuits de l'enfant sont difficiles, et ses journées encore plus. Il veut comprendre. Comprendre que le monstre n'est pas un être différent de lui, hors de l'humanité, mais un être comme lui qui prend des décisions différentes. Depuis ce jour, l'enfant a peur de lui-même, il sait qu'il cohabite avec une bête violente et sanguinaire, il souhaite la tenir toute sa vie dans sa cage.

L'enfant c'était l'auteur du livre.

Je ne suis pas juif, je ne suis pas Allemand, je ne suis pas japonais et je suis né plus tard; mais Auschwitz, la destruction de Berlin et le feu de Hiroshima font désormais partie de ma vie. »

Eric-Emmanuel Schmitt, La part de l'autre.

N'oubliez jamais que vous pouvez contrôler vos choix. Pour une existence heureuse, oubliez cette interrogation : « que se serait-il passé si ». Personne ne peut le savoir sur le moment, puisque cette réflexion n'est menée qu'a posteriori.

Les dix commandements



12 août 2005


1- Connais-toi toi-même (Socrate).

2- Apprécie avec justesse ta réalité.

3- « Supprime l'opinion fausse, tu supprimes le mal » (Épictète).

4- Sois stoïque quand il le faut.

5- Sois indifférent à ta propre humeur (sépare-toi de tes fautes, de tes regrets).

6- Fais ton propre bonheur (c'est le bonheur reçu qui nous fuit).

7- Souris même lorsque tout semble aller de travers.

8- Sache que le silence peut être une forme de sagesse.

9- Regarde au-delà de la surface des choses (« quand le sage pointe la lune, l'idiot regarde le doigt »).

10- Oublie les neuf points précédents. Forge-toi ta propre vision d'une vie heureuse!

Quel temps nous appartient ?



10 août 2005


« Sur l'avenir, tout le monde se trompe. L'homme ne peut être sûr que du moment présent. Mais est-ce bien vrai? Peut-il vraiment le connaître, le présent? Est-il capable de le juger? Bien sûr que non. Car comment celui qui ne connaît pas l'avenir pourrait-il comprendre le sens du présent? Si nous ne savons pas vers quel avenir le présent nous mène, comment pourrions-nous dire que ce présent est bon ou mauvais, qu'il mérite notre adhésion, notre méfiance ou notre haine? » (Milan Kundera, L'ignorance)

L'étranger



09 août 2005


« [...] Alors, je ne sais pas pourquoi, il y a quelque chose qui a crevé en moi. Je me suis mis à crier à plein gosier et je l'ai insulté et je lui ai dit de ne pas prier. Je l'avais pris par le collet de sa soutane. Je déversais sur lui le fond de mon coeur avec des bondissements mêlés de joie et de colère. Il avait l'air si certain n'est-ce pas ? Pourtant, aucune de ses certitudes ne valait un cheveu de femme. Il n'était même pas sûr d'être en vie puisqu'il vivait comme un mort. Moi, j'avais l'air d'avoir les mains vides. Mais j'étais sûr de moi, sûr de tout, plus sûr que lui, sûr de ma vie et de cette mort qui allait venir.

Oui, je n'avais que cela. Mais du moins, je tenais cette vérité autant qu'elle me tenait. J'avais eu raison, j'avais encore raison, j'avais toujours raison. J'avais vécu de telle façon et j'aurais pu vivre de telle autre. J'avais fait ceci et je n'avais pas fait cela. Je n'avais pas fait telle chose alors que j'avais fait cette autre. Et après ? C'était comme si j'avais attendu pendant tout le temps cette minute et cette petite aube où je serais justifié. Rien, rien n'avait d'importance et je savais bien pourquoi. Lui aussi savait pourquoi. Du fond de mon avenir, pendant toute cette vie absurde que j'avais menée, un souffle obscur remontait vers moi à travers des années qui n'étaient pas encore venues et ce souffle égalisait sur son passage tout ce qu'on me proposait alors dans les années pas plus réelles que je vivais. [...]

Comme si cette colère m'avait purgé du mal, vidé d'espoir, devant cette nuit chargée de signes et d'étoiles, je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l'éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j'ai senti que j'avais été heureux, et que je l'étais encore. Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine. » (Albert Camus, L'Étranger)

Les Américains : Mal connus, mal aimés, mal compris



08 août 2005


Détestés par plusieurs et louangés par certains, les Américains font l'objet de maintes critiques, et ce, aux quatre coins du globe depuis leur intervention en Irak (2003). La réélection du président George W. Bush en novembre 2004 n'a fait que renforcer le mythe d'une nation américaine homogène. "Ah ces **** d'Américains" est une phrase à la mode dans le vocabulaire des citoyens occidentaux (c'est-à-dire à l'extérieur des États-Unis). Si le discours politique souvent empreint de références religieuses (peuple élu, mission...) et leur semblant omnipotence au sein de l'ONU et vis-à-vis de leurs alliés peut nous agacer, il faut toujours avoir à l'esprit que ce n'est pas la majorité des Américains qui ont élu G.W. Bush et non plus celle qui prône des valeurs conservatrices. Pour tous ceux qui perçoivent les Américains comme un bloc monolithique, une lecture de l'ouvrage (en 2 tomes) Les Américains d'André Kaspi s'impose.

Un fait historique ne parle pas par lui-même, il revient à l'historien de rechercher et de déterminer ce qui est historique et ce qui est représentatif de l'ensemble de courants et de tendances dans le but de contribuer par la suite à l'élaboration d'une explication. À partir de cette prémisse, on peut affirmer que l'étude de l'histoire des États-Unis, de leur naissance jusqu'à nos jours, peut être abordée différemment selon la perspective envisagée. À cet effet, un spécialiste français et professeur d'histoire de l'Amérique du Nord à la Sorbonne, André Kaspi, a publié en deux tomes une histoire américaine. Véritable ouvrage de référence, Kaspi opte pour une vision nuancée de l'histoire américaine.

Premier exemple de cette aptitude de l'auteur à nuancer ses propos, selon André Kaspi, on doit reconnaître que les historiens américains ont privilégié pendant longtemps une image peu glorieuse de la nature de l'Amérindien. De ce fait, l'auteur adopte une vision plus nuancée de la situation tout en évitant « d'attribuer aux Visages-Pâles tous les défauts et tous les crimes, comme si les Peaux-Rouges avaient été des victimes perpétuellement innocentes. » Lorsqu'il aborde l'aspect des échanges entre Blancs et Indiens, Kaspi évoque le fait que ces derniers profitent des produits européens, mais qu'en contrepartie ils interviennent dans un monde qui leur est nouveau, celui de l'offre et de la demande. Pour ce qui est du problème de la terre, l'auteur relève une idée intéressante. Les historiens affirment souvent que les Indiens ne connaissent pas la notion de propriété individuelle tandis que Kaspi rappelle que ce concept n'est pas universel et que l'on retrouve notamment chez les Hurons la notion de défrichement selon le bon gré de l'individu. Cette nuance chez l'auteur ne dissimule pas pour autant un parti-pris pour les Américains même si à quelques reprises, il ne se gêne pas pour rappeler le manque de respect des colons envers les traditions, la culture et les comportements des Indiens. En somme, Kaspi souhaite éviter le piège du mélodrame tout en gardant comme objectif de comprendre comment et pourquoi les Européens sont parvenus à installer leur domination.

Lorsqu'il traite des colonies américaines à la veille de l'indépendance, André Kaspi utilise l'expression « l'unité dans la diversité » pour qualifier le peuple américain de cette époque. De ce fait, il examine la vie religieuse des colonies et rapporte qu'il existe plusieurs regroupements religieux, la plupart unis sous le vocable qu'est le protestantisme. Cependant, il ne faut pas croire que la tolérance règne partout comme en Pennsylvanie, puisque jusqu'à la fin du XVIIIe siècle – là où la foi religieuse décline au profit de la raison – les tensions religieuses sont présentes entre les différentes congrégations. L'auteur souligne, en outre, que les colonies prennent conscience de l'importance de s'unir et de tisser des liens de solidarité à la suite de la crise de 1767-1770. Par contre, les colons ne réagissent pas de la même manière, « [l]es uns se contentent de recourir au boycottage, d'envoyer des pétitions […] [l]es autres sont des « radicaux », des « patriotes », des « violents ». » Voilà donc une fois encore l'approche privilégiée de Kaspi, celle de nuancer les événements du passé dans une évaluation de la période pré-révolutionnaire.

Je recommande ces deux tomes à tous ceux qui sont intéressés par l'histoire américaine et qui veulent acquérir une vision nuancée des événements qui ont marqué l'histoire de ce jeune pays. Par contre, si vous voulez une perspective différente je vous suggère de consulter l'ouvrage d'Howard Zinn (un gauchiste américain) Une histoire populaire des États-Unis de 1492 à nos jours, ce dernier expose la vision de ceux dont on n'a habituellement pas le récit dans les manuels d'histoire (les Indiens, les esclaves en fuite, les soldats déserteurs, les jeunes ouvrières du textile, les GI du Vietnam, etc.). J'aurai certainement la chance de rédiger un commentaire sur ce livre dans les prochaines semaines.

« Que cette histoire te serve de leçon! »



04 août 2005


Le 21 janvier 1961, John Fitzgerald Kennedy devient le trente-cinquième président des États-Unis avec la plus petite majorité de l'histoire du pays à l'époque, soit 120 000 voix d'avance sur 70 millions de suffrages. Le 30 avril 1975, la chute de Saigon étant inévitable, le dernier hélicoptère américain quitte de force le territoire du Sud-Vietnam et le jour de « délivrance » a sonné pour les États-Unis comme le souligne le Washington Post. Si en 1961 tous les espoirs étaient permis et qu'on accueillait avec enthousiasme la vision de la « nouvelle frontière » de Kennedy, quelque quinze ans plus tard, un sentiment de désespoir envahit la population américaine qui entrevoit désormais l'avenir avec pessimisme, au terme d'une guerre au cours de laquelle aucun dirigeant américain n'avait songé à l'éventualité d'une défaite.

La victoire des communistes du Nord confirmée, les États-Unis subissent l'humiliante défaite du plus long conflit militaire de leur histoire pour lequel l'on prévoyait pourtant, dès 1962, un désengagement militaire. Un peu plus de 58 000 soldats américains sont morts au combat et la perte de ces combattants fut le prix à payer pour que les État-Unis reconnaissent leurs limites, de telle sorte qu'à la suite de cette guerre, les décisions relatives aux relations internationales seront désormais envisagées de façon différente. De ce fait, c'est dans la crainte d'un « autre Viêt-nam » que lors de la guerre du Golfe en 1991, le président George Bush décide de ne pas poursuivre l'opération militaire jusqu'à Bagdad.

La guerre du Viêt-nam
a-t-elle vraiment servi de leçon au peuple américain ? J'en doute lorsque je regarde ce qui se passe en Irak. L'Holocauste (la Shoah) commis par les nazis à l'endroit des Juifs (dans une forte proportion) a-t-il conscientisé la communauté internationale ? En tout cas, cela n'a pas empêché Pol Pot et les Khmers rouges d'exterminer plus de 1 million d'individus ou les Rwandais de s'entretuer.

La sagesse s'acquiert notamment lorsqu'un individu apprend de ses expériences (bonnes ou mauvaises). La plupart des êtres humains ne peuvent être qualifiés de sages puisqu'ils ne se servent pratiquement jamais de leurs expériences. Certes, je généralise. Je ne prétends pas connaître la majorité des êtres humains ! De plus, mon opinion se base uniquement sur un point de vue personnel et non sur une analyse exhaustive. D'abord, sur le plan individuel, je suis exaspéré de voir que des actes criminels sont souvent commis par des récidivistes (pédophiles, violeurs, etc.) ou encore par des conducteurs en état d'ébriété. Ensuite, au niveau politique, je suis tanné d'entendre la même rengaine dans le discours des hommes d'État : « Nous ne ferons pas comme le gouvernement précédent » ou bien « nous avons appris des leçons de l'histoire » (d'autant plus que l'histoire ne donne pas de leçons, mais en éclaire les choix).

Un sage n'est pas nécessairement un homme âgé qui a vécu beaucoup d'expériences durant sa vie. La sagesse s'acquiert lorsqu'on est confronté à quelque chose (une épreuve difficile) qui nous apprend quelque chose... c'est-à-dire qu'on arrive à la sagesse grâce à l'interprétation des événements. Ce n'est pas le nombre d'échecs qui rend quelqu'un plus sage, mais plutôt lorsqu'on réussit à en retirer quelque chose par processus dialectique (raisonnement) ou dialogique (dialogue).

« L'économie politique de l'esclavage »



01 août 2005


Récipiendaire d'un prix littéraire pour son livre Roll, Jordan, Roll : The World the Slaves Made traitant des racines de l'esclavage, Eugene D. Genovese, un éminent historien marxiste, étudie cette fois-ci dans son ouvrage intitulé L'économie politique de l'esclavage, le problème esclavagiste dans le développement économique du Sud américain avant la guerre de Sécession.

L'auteur y remet en cause les nouvelles thèses des historiens et soutient la théorie traditionaliste. S'appuyant sur le faible niveau de la demande dans la société esclavagiste, cette approche impute au système de la plantation tous les problèmes de l'économie du Sud qui, au- delà de la guerre de Sécession, perdurent pendant la période de reconstruction de l'Union américaine.

Dans un premier temps, Eugene D. Genovese expose ce qui constitue le marché économique de l'époque. Il démontre qu'un large fossé s'est creusé : d'un côté, le Nord a réussi à se forger un marché intérieur et de l'autre, le Sud doit se tourner essentiellement vers son commerce extérieur car il n'a su développer un marché industriel. S'inspirant notamment des auteurs George Rogers Taylor, The Transportation Revolution, 1815-1860 (Economic History of the United States, Vol 4) (New York, 1951) et Philip Sheldon Foner, Business and Slavery: The New York Merchants and the Irrepressible Conflict (Chapel Hill, N.C. 1941), Genovese rejette l'hypothèse de Robert Greenhalgh Albion et d'autres auteurs contemporains qui attribuent au Sud un marché industriel équivalent à celui du Nord.

De plus, il considère que le faible niveau de la demande n'est pas tributaire de l'autosuffisance du Sud mais plutôt du manque de production industrielle lié à une pauvreté qui s'étend sur une grande partie de la population sudiste. Cette pauvreté est renforcée par l'idéologie anti-industrielle et anti-urbaine du Sud qui, contrairement à la Nouvelle-Angleterre ou à l'Ouest américain, ne se libérera de sa mentalité agrarienne que tardivement.

La faible densité de population au mille carré, jumelée à un système de transport peu adéquat, ne font qu'augmenter le retard de l'industrie du coton et l'empêcher aussi de se relier au marché global. L'auteur compare alors le Sud aux pays sous-développés de notre époque, les deux ayant un marché local faible qui se fait concurrencer par de plus vastes marchés.

Dans un deuxième temps, Eugene Genovese examine l'importance du marché rural sudiste par rapport aux autres marchés ruraux américains. Il signale que la Phelps, Dodge & Co, spécialisée dans le transport du coton, n'a que 5% de sa marchandise qui provient du Sud, la grande majorité de celle-ci provenant de l'Ouest qui constituait un marché plus intéressant. L'historien démontre également que le pouvoir d'achat des fermiers du Sud est faible : pour la région du Mississippi par exemple, ces derniers dépensent en moyenne 30 à 35 dollars par personne par année comparativement aux petits agriculteurs de l'Ouest qui dépensent de 100 à 600 dollars.

Finalement, Genovese relève que le peu de villes de 15 000 habitants dans le Sud est la conséquence d'un marché rural peu développé qui empêche l'industrialisation, l'urbanisation et par le fait même, un marché intérieur. La faiblesse de ce marché intérieur conduit les États esclavagistes situés en bordure des États nordistes, à développer avec ces derniers des liens commerciaux au moment même où les États sudistes auraient besoin de se rallier tous ensemble pour défendre leur idéologie et leur système économique.

Soutenu seulement par la plantation esclavagiste, le développement d'industries dans le Sud est voué à l'échec. Le faible niveau de la demande est en grande partie responsable du retard industriel qui s'observe à cette époque dans le Sud américain et il faudra attendre bien au-delà de la guerre de Sécession pour en arriver à une plus juste répartition industrielle.

De fait, la comparaison entre les pays sous développés du 20e siècle et le Sud américain m'apparaît comme l'argument central de l'exposé de l'auteur, celui que j'estime être le mieux élaboré. L'absence d'une réforme agraire dans les deux systèmes comparés empêche la création d'une nouvelle classe ouvrière qui stimulerait un développement industriel et ainsi favoriserait l'éclosion d'un marché intérieur. Tout comme les grandes puissances économiques actuelles qui profitent du marché intérieur des régions peu développées, le Sud américain était concurrencé par le Nord et par l'Ouest qui constituaient alors des marchés plus vastes qui produisaient à un niveau plus élevé.

Eugene Genovese est un historien marxiste réputé et respecté, cependant son texte comporte une faille notable au niveau du titre d'un des chapitres de l'ouvrage en question (imputable peut être à la traduction française). En effet, à la lecture du titre « l'importance de la plantation esclavagiste dans le développement économique du Sud », j'ai présumé que le chapitre traiterait des avantages de la plantation esclavagiste mais je me suis vite rendu compte que j'avais été mal orienté. Selon moi, le titre doit donner la ligne de pensée que l'auteur emprunte tout au long de son récit; toutefois, il m'a fallu trouver la problématique et lire la conclusion pour saisir exactement les propos de l'auteur.

Malgré cet accroc rencontré à la lecture du texte, j'estime que l'auteur a bien mené sa recherche. Le texte est structuré, les arguments s'enchaînent bien et on y retrouve de nombreuses sources bibliographiques.