« L'économie politique de l'esclavage »
Récipiendaire d'un prix littéraire pour son livre Roll, Jordan, Roll : The World the Slaves Made traitant des racines de l'esclavage, Eugene D. Genovese, un éminent historien marxiste, étudie cette fois-ci dans son ouvrage intitulé L'économie politique de l'esclavage, le problème esclavagiste dans le développement économique du Sud américain avant la guerre de Sécession.
L'auteur y remet en cause les nouvelles thèses des historiens et soutient la théorie traditionaliste. S'appuyant sur le faible niveau de la demande dans la société esclavagiste, cette approche impute au système de la plantation tous les problèmes de l'économie du Sud qui, au- delà de la guerre de Sécession, perdurent pendant la période de reconstruction de l'Union américaine.
Dans un premier temps, Eugene D. Genovese expose ce qui constitue le marché économique de l'époque. Il démontre qu'un large fossé s'est creusé : d'un côté, le Nord a réussi à se forger un marché intérieur et de l'autre, le Sud doit se tourner essentiellement vers son commerce extérieur car il n'a su développer un marché industriel. S'inspirant notamment des auteurs George Rogers Taylor, The Transportation Revolution, 1815-1860 (Economic History of the United States, Vol 4) (New York, 1951) et Philip Sheldon Foner, Business and Slavery: The New York Merchants and the Irrepressible Conflict (Chapel Hill, N.C. 1941), Genovese rejette l'hypothèse de Robert Greenhalgh Albion et d'autres auteurs contemporains qui attribuent au Sud un marché industriel équivalent à celui du Nord.
De plus, il considère que le faible niveau de la demande n'est pas tributaire de l'autosuffisance du Sud mais plutôt du manque de production industrielle lié à une pauvreté qui s'étend sur une grande partie de la population sudiste. Cette pauvreté est renforcée par l'idéologie anti-industrielle et anti-urbaine du Sud qui, contrairement à la Nouvelle-Angleterre ou à l'Ouest américain, ne se libérera de sa mentalité agrarienne que tardivement.
La faible densité de population au mille carré, jumelée à un système de transport peu adéquat, ne font qu'augmenter le retard de l'industrie du coton et l'empêcher aussi de se relier au marché global. L'auteur compare alors le Sud aux pays sous-développés de notre époque, les deux ayant un marché local faible qui se fait concurrencer par de plus vastes marchés.
Dans un deuxième temps, Eugene Genovese examine l'importance du marché rural sudiste par rapport aux autres marchés ruraux américains. Il signale que la Phelps, Dodge & Co, spécialisée dans le transport du coton, n'a que 5% de sa marchandise qui provient du Sud, la grande majorité de celle-ci provenant de l'Ouest qui constituait un marché plus intéressant. L'historien démontre également que le pouvoir d'achat des fermiers du Sud est faible : pour la région du Mississippi par exemple, ces derniers dépensent en moyenne 30 à 35 dollars par personne par année comparativement aux petits agriculteurs de l'Ouest qui dépensent de 100 à 600 dollars.
Finalement, Genovese relève que le peu de villes de 15 000 habitants dans le Sud est la conséquence d'un marché rural peu développé qui empêche l'industrialisation, l'urbanisation et par le fait même, un marché intérieur. La faiblesse de ce marché intérieur conduit les États esclavagistes situés en bordure des États nordistes, à développer avec ces derniers des liens commerciaux au moment même où les États sudistes auraient besoin de se rallier tous ensemble pour défendre leur idéologie et leur système économique.
Soutenu seulement par la plantation esclavagiste, le développement d'industries dans le Sud est voué à l'échec. Le faible niveau de la demande est en grande partie responsable du retard industriel qui s'observe à cette époque dans le Sud américain et il faudra attendre bien au-delà de la guerre de Sécession pour en arriver à une plus juste répartition industrielle.
De fait, la comparaison entre les pays sous développés du 20e siècle et le Sud américain m'apparaît comme l'argument central de l'exposé de l'auteur, celui que j'estime être le mieux élaboré. L'absence d'une réforme agraire dans les deux systèmes comparés empêche la création d'une nouvelle classe ouvrière qui stimulerait un développement industriel et ainsi favoriserait l'éclosion d'un marché intérieur. Tout comme les grandes puissances économiques actuelles qui profitent du marché intérieur des régions peu développées, le Sud américain était concurrencé par le Nord et par l'Ouest qui constituaient alors des marchés plus vastes qui produisaient à un niveau plus élevé.
Eugene Genovese est un historien marxiste réputé et respecté, cependant son texte comporte une faille notable au niveau du titre d'un des chapitres de l'ouvrage en question (imputable peut être à la traduction française). En effet, à la lecture du titre « l'importance de la plantation esclavagiste dans le développement économique du Sud », j'ai présumé que le chapitre traiterait des avantages de la plantation esclavagiste mais je me suis vite rendu compte que j'avais été mal orienté. Selon moi, le titre doit donner la ligne de pensée que l'auteur emprunte tout au long de son récit; toutefois, il m'a fallu trouver la problématique et lire la conclusion pour saisir exactement les propos de l'auteur.
Malgré cet accroc rencontré à la lecture du texte, j'estime que l'auteur a bien mené sa recherche. Le texte est structuré, les arguments s'enchaînent bien et on y retrouve de nombreuses sources bibliographiques.
L'auteur y remet en cause les nouvelles thèses des historiens et soutient la théorie traditionaliste. S'appuyant sur le faible niveau de la demande dans la société esclavagiste, cette approche impute au système de la plantation tous les problèmes de l'économie du Sud qui, au- delà de la guerre de Sécession, perdurent pendant la période de reconstruction de l'Union américaine.
Dans un premier temps, Eugene D. Genovese expose ce qui constitue le marché économique de l'époque. Il démontre qu'un large fossé s'est creusé : d'un côté, le Nord a réussi à se forger un marché intérieur et de l'autre, le Sud doit se tourner essentiellement vers son commerce extérieur car il n'a su développer un marché industriel. S'inspirant notamment des auteurs George Rogers Taylor, The Transportation Revolution, 1815-1860 (Economic History of the United States, Vol 4) (New York, 1951) et Philip Sheldon Foner, Business and Slavery: The New York Merchants and the Irrepressible Conflict (Chapel Hill, N.C. 1941), Genovese rejette l'hypothèse de Robert Greenhalgh Albion et d'autres auteurs contemporains qui attribuent au Sud un marché industriel équivalent à celui du Nord.
De plus, il considère que le faible niveau de la demande n'est pas tributaire de l'autosuffisance du Sud mais plutôt du manque de production industrielle lié à une pauvreté qui s'étend sur une grande partie de la population sudiste. Cette pauvreté est renforcée par l'idéologie anti-industrielle et anti-urbaine du Sud qui, contrairement à la Nouvelle-Angleterre ou à l'Ouest américain, ne se libérera de sa mentalité agrarienne que tardivement.
La faible densité de population au mille carré, jumelée à un système de transport peu adéquat, ne font qu'augmenter le retard de l'industrie du coton et l'empêcher aussi de se relier au marché global. L'auteur compare alors le Sud aux pays sous-développés de notre époque, les deux ayant un marché local faible qui se fait concurrencer par de plus vastes marchés.
Dans un deuxième temps, Eugene Genovese examine l'importance du marché rural sudiste par rapport aux autres marchés ruraux américains. Il signale que la Phelps, Dodge & Co, spécialisée dans le transport du coton, n'a que 5% de sa marchandise qui provient du Sud, la grande majorité de celle-ci provenant de l'Ouest qui constituait un marché plus intéressant. L'historien démontre également que le pouvoir d'achat des fermiers du Sud est faible : pour la région du Mississippi par exemple, ces derniers dépensent en moyenne 30 à 35 dollars par personne par année comparativement aux petits agriculteurs de l'Ouest qui dépensent de 100 à 600 dollars.
Finalement, Genovese relève que le peu de villes de 15 000 habitants dans le Sud est la conséquence d'un marché rural peu développé qui empêche l'industrialisation, l'urbanisation et par le fait même, un marché intérieur. La faiblesse de ce marché intérieur conduit les États esclavagistes situés en bordure des États nordistes, à développer avec ces derniers des liens commerciaux au moment même où les États sudistes auraient besoin de se rallier tous ensemble pour défendre leur idéologie et leur système économique.
Soutenu seulement par la plantation esclavagiste, le développement d'industries dans le Sud est voué à l'échec. Le faible niveau de la demande est en grande partie responsable du retard industriel qui s'observe à cette époque dans le Sud américain et il faudra attendre bien au-delà de la guerre de Sécession pour en arriver à une plus juste répartition industrielle.
De fait, la comparaison entre les pays sous développés du 20e siècle et le Sud américain m'apparaît comme l'argument central de l'exposé de l'auteur, celui que j'estime être le mieux élaboré. L'absence d'une réforme agraire dans les deux systèmes comparés empêche la création d'une nouvelle classe ouvrière qui stimulerait un développement industriel et ainsi favoriserait l'éclosion d'un marché intérieur. Tout comme les grandes puissances économiques actuelles qui profitent du marché intérieur des régions peu développées, le Sud américain était concurrencé par le Nord et par l'Ouest qui constituaient alors des marchés plus vastes qui produisaient à un niveau plus élevé.
Eugene Genovese est un historien marxiste réputé et respecté, cependant son texte comporte une faille notable au niveau du titre d'un des chapitres de l'ouvrage en question (imputable peut être à la traduction française). En effet, à la lecture du titre « l'importance de la plantation esclavagiste dans le développement économique du Sud », j'ai présumé que le chapitre traiterait des avantages de la plantation esclavagiste mais je me suis vite rendu compte que j'avais été mal orienté. Selon moi, le titre doit donner la ligne de pensée que l'auteur emprunte tout au long de son récit; toutefois, il m'a fallu trouver la problématique et lire la conclusion pour saisir exactement les propos de l'auteur.
Malgré cet accroc rencontré à la lecture du texte, j'estime que l'auteur a bien mené sa recherche. Le texte est structuré, les arguments s'enchaînent bien et on y retrouve de nombreuses sources bibliographiques.