La danse des masques
« J'ai toujours vu que pour réussir dans le monde, il fallait avoir l'air fou et être sage. » Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu (1689-1755), Mes pensées.
Dans les forces armées, toutes nations confondues, l'équipement du soldat est fabriqué de telle sorte qu'il puisse se mettre aisément hors de portée de la vue de l'ennemi, c'est ce qu'on appelle un procédé de camouflage. Cette technique est d'une grande utilité en permettant, entre autres, au combattant de se confondre avec le décor et ainsi de surprendre son opposant ou encore de ne pas être repéré par un tireur embusqué.
Dans la nature ce moyen est aussi employé : c'est la propriété que possède certains animaux d'imiter une caractéristique de leur environnement ou d'une espèce animale redoutée d'une catégorie de prédateurs afin de se protéger ou de profiter d'un avantage.
C'est ce qu'on appelle le mimétisme qui implique un système mimétique comportant un modèle, considéré comme un agent émetteur de stimuli ou de signaux perceptibles aux sens, un mime qui est l'animal ou le végétal qui plagient ce modèle, et des dupes, animaux ennemis ou victimes du mime, dont les sens sont réceptifs aux stimuli émis par le modèle et sont leurrés par le mime. Le caméléon est remarquable non seulement parce que ses yeux sont indépendants l'un de l'autre, mais surtout à cause de sa peau qui change de coloration selon le milieu.
Alors, quel est le but de ces quelques propos en guise d'introduction pour ce présent essai ?
Lorsque nous abordons la notion de camouflage en regard à l'espèce humaine, l'idée que notre cerveau transmet spontanément à l'esprit c'est l'action de camoufler ou de dissimuler quelque chose qui nous déplaît pour le rendre méconnaissable afin que notre entourage ne le remarque point. C'est en quelque sorte une « autoprotection » que l'on se fixe pour se protéger de nos prédateurs potentiels, soit d'autres humains qui sont nos rivaux.
Les raisons que l'on évoque pour utiliser ce stratagème varient passablement, selon les individus et les situations, et cachent souvent un certain malaise vis-à-vis notre moi. En psychologie, ce concept fait référence à la personnalité et l'individualité de chaque être humain et aussi ce qui lui permet de s'adapter à la réalité et de contrôler ses pulsions.
Dans la vie, à plusieurs instants, nous tentons de cacher notre vraie nature ou bien encore nous voulons dissimuler un certain mal de vivre en nous évadant de ce monde, par plusieurs moyens, où la réalité nous semble plus agréable. Si la quête du bonheur rentre certainement en jeu lorsque nous voulons nous évader de ce monde, ce moment de béatitude est toutefois de courte durée, car les moyens utilisés pour raviver cette flamme disparue sont souvent constitués pour procurer un intense plaisir lors de l'activation.
L'effet se dissipe rapidement et nous revenons alors à la case départ, c'est-à-dire que le bonheur n'est pas atteint. C'est dans cette catégorie que nous pouvons insérer l'utilisation abusive de drogues et d'alcool, la pratique à outrance de sports extrêmes et la quête d'un modèle ou d'un héros afin de construire notre existence sur une base irréelle mais combien attirante.
La négation de qui nous sommes réellement constitue une des tactiques employées par un bon nombre de personne, et ce, peu importe l'âge, malgré le fait que nous ne pouvons échapper un jour ou l'autre à la réalité. Pour reprendre sous une autre forme une idée émise par Blaise Pascal dans ses Pensées, c'est que la réalité (le présent) d'ordinaire nous blesse et il est bien plus facile d'envisager de transformer qui nous sommes au profit d'une image qui illumine davantage nos désirs reflétant ainsi aux autres une déformation brouillée de notre vraie nature.
Que chacun examine ses actions et ses pensées au quotidien. En faisant cette analyse on se rend compte que, la plupart du temps, nous agissons non pas en fonction de qui nous sommes véritablement, mais plutôt en jonglant entre qui nous désirons être et l'image de qui nous voulons projeter à ceux qui nous côtoie.
Depuis les tout premiers soubresauts de l'humanité, l'homme pratique le rituel du masque. La plupart des civilisations connues ont en effet vu leurs guerriers se masquer pour effrayer leurs adversaires et leurs grands sorciers faisaient de même pour faire croire à leurs adeptes qu'ils possédaient d'étranges pouvoirs. De nos jours, bien que fictif, le masque est toujours utilisé et nous le portons pour créer un écran de protection ou une image flatteuse que nous voulons donner de nous même.
L'homme en sortant de l'état de nature a dû se constituer en société. Selon Thomas Hobbes, philosophe politique anglais du XVIIe siècle, le contrat social conclu entre les hommes est essentiel étant donné que « l'état de nature est un état de guerre de tous contre tous (L'homme est un loup pour l'homme). » (Thomas Hobbes, 1588-1679, Le Léviathan)
Toutefois, bien que l'on peut être en accord avec cette proposition, on ne peut nier que l'esprit de compétition est toujours présent parmi les hommes et que, même en société, l'état animal de l'homme (soit l'état de nature) est applicable lorsqu'on examine les relations interpersonnelles. Le port du masque s'avère ainsi une solution pour paraître à son meilleur afin d'avoir le dessus sur les autres et de ne pas étaler au grand jour nos défauts ou certains traits de notre personnalité qui nous déplaisent.
Cette façon d'agir est mise de l'avant à outrance par plusieurs êtres humains de notre ère, mais à force de camoufler notre vraie nature et de mentir à ceux que l'on aime, ne risque-t-on pas de payer encore plus cher leur déception ? Bien que nous tâchons tous d'améliorer certains aspects de notre personne, avoir recourt au port du masque simplement pour nous permettre pendant un bref moment d'être quelqu'un d'autre ne garantit pas le bonheur à long terme.
Sans contredit, rien n'est stable dans la vie : tout change à tout moment, tout s'écoule et même les montagnes, symboles de pérennité, se transforment imperceptiblement sous l'action ininterrompue de l'érosion. Ce qui est aussi le plus remarquable, contrairement à la nature humaine, c'est que dans ce mouvement chaque chose devient autre tout en restant cependant la même. Bien que nous sommes issus de l'état de nature et que nous sommes des créatures terrestres, nous ne nous transformons pas au fil des années en demeurant tout de même fidèles à notre personnalité singulière.
Ce que je suis et que je pense aujourd'hui n'implique pas nécessairement une constante tout au long de l'existence, c'est ce qu'indique à merveille la célèbre formule : « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve » (citée par Platon dans le Cratyle). Le fleuve dans lequel j'entre aujourd'hui est bien le même que celui dans lequel je suis entré hier, mais ses eaux depuis se sont renouvelées, faisant de lui un fleuve autre. L'être que je suis se renouvelle sans cesse, en puisant dans de nouvelles ressources un peu partout autour de lui, mais l'important c'est de ne jamais perdre de vue tout ce que l'on a reçu par la source originelle, puisqu'une des merveilles de l'être humain c'est sa singularité.
Les masques dansent sans cesse autour de nous, l'important c'est d'apprendre à se connaître en évitant de glisser dans le piège d'utiliser un masque différent en fonction de la personne ou de la situation que nous faisons face. Finalement, nous nous devons de respecter notre individualité. C'est ce qui fait la force de l'être humain, car bien qu'à la base nous sommes tous pareils, il n'y a pas deux êtres humains fondamentalement identiques; du moins pas encore...
Dans les forces armées, toutes nations confondues, l'équipement du soldat est fabriqué de telle sorte qu'il puisse se mettre aisément hors de portée de la vue de l'ennemi, c'est ce qu'on appelle un procédé de camouflage. Cette technique est d'une grande utilité en permettant, entre autres, au combattant de se confondre avec le décor et ainsi de surprendre son opposant ou encore de ne pas être repéré par un tireur embusqué.
Dans la nature ce moyen est aussi employé : c'est la propriété que possède certains animaux d'imiter une caractéristique de leur environnement ou d'une espèce animale redoutée d'une catégorie de prédateurs afin de se protéger ou de profiter d'un avantage.
C'est ce qu'on appelle le mimétisme qui implique un système mimétique comportant un modèle, considéré comme un agent émetteur de stimuli ou de signaux perceptibles aux sens, un mime qui est l'animal ou le végétal qui plagient ce modèle, et des dupes, animaux ennemis ou victimes du mime, dont les sens sont réceptifs aux stimuli émis par le modèle et sont leurrés par le mime. Le caméléon est remarquable non seulement parce que ses yeux sont indépendants l'un de l'autre, mais surtout à cause de sa peau qui change de coloration selon le milieu.
Alors, quel est le but de ces quelques propos en guise d'introduction pour ce présent essai ?
Lorsque nous abordons la notion de camouflage en regard à l'espèce humaine, l'idée que notre cerveau transmet spontanément à l'esprit c'est l'action de camoufler ou de dissimuler quelque chose qui nous déplaît pour le rendre méconnaissable afin que notre entourage ne le remarque point. C'est en quelque sorte une « autoprotection » que l'on se fixe pour se protéger de nos prédateurs potentiels, soit d'autres humains qui sont nos rivaux.
Les raisons que l'on évoque pour utiliser ce stratagème varient passablement, selon les individus et les situations, et cachent souvent un certain malaise vis-à-vis notre moi. En psychologie, ce concept fait référence à la personnalité et l'individualité de chaque être humain et aussi ce qui lui permet de s'adapter à la réalité et de contrôler ses pulsions.
Dans la vie, à plusieurs instants, nous tentons de cacher notre vraie nature ou bien encore nous voulons dissimuler un certain mal de vivre en nous évadant de ce monde, par plusieurs moyens, où la réalité nous semble plus agréable. Si la quête du bonheur rentre certainement en jeu lorsque nous voulons nous évader de ce monde, ce moment de béatitude est toutefois de courte durée, car les moyens utilisés pour raviver cette flamme disparue sont souvent constitués pour procurer un intense plaisir lors de l'activation.
L'effet se dissipe rapidement et nous revenons alors à la case départ, c'est-à-dire que le bonheur n'est pas atteint. C'est dans cette catégorie que nous pouvons insérer l'utilisation abusive de drogues et d'alcool, la pratique à outrance de sports extrêmes et la quête d'un modèle ou d'un héros afin de construire notre existence sur une base irréelle mais combien attirante.
La négation de qui nous sommes réellement constitue une des tactiques employées par un bon nombre de personne, et ce, peu importe l'âge, malgré le fait que nous ne pouvons échapper un jour ou l'autre à la réalité. Pour reprendre sous une autre forme une idée émise par Blaise Pascal dans ses Pensées, c'est que la réalité (le présent) d'ordinaire nous blesse et il est bien plus facile d'envisager de transformer qui nous sommes au profit d'une image qui illumine davantage nos désirs reflétant ainsi aux autres une déformation brouillée de notre vraie nature.
Que chacun examine ses actions et ses pensées au quotidien. En faisant cette analyse on se rend compte que, la plupart du temps, nous agissons non pas en fonction de qui nous sommes véritablement, mais plutôt en jonglant entre qui nous désirons être et l'image de qui nous voulons projeter à ceux qui nous côtoie.
Depuis les tout premiers soubresauts de l'humanité, l'homme pratique le rituel du masque. La plupart des civilisations connues ont en effet vu leurs guerriers se masquer pour effrayer leurs adversaires et leurs grands sorciers faisaient de même pour faire croire à leurs adeptes qu'ils possédaient d'étranges pouvoirs. De nos jours, bien que fictif, le masque est toujours utilisé et nous le portons pour créer un écran de protection ou une image flatteuse que nous voulons donner de nous même.
L'homme en sortant de l'état de nature a dû se constituer en société. Selon Thomas Hobbes, philosophe politique anglais du XVIIe siècle, le contrat social conclu entre les hommes est essentiel étant donné que « l'état de nature est un état de guerre de tous contre tous (L'homme est un loup pour l'homme). » (Thomas Hobbes, 1588-1679, Le Léviathan)
Toutefois, bien que l'on peut être en accord avec cette proposition, on ne peut nier que l'esprit de compétition est toujours présent parmi les hommes et que, même en société, l'état animal de l'homme (soit l'état de nature) est applicable lorsqu'on examine les relations interpersonnelles. Le port du masque s'avère ainsi une solution pour paraître à son meilleur afin d'avoir le dessus sur les autres et de ne pas étaler au grand jour nos défauts ou certains traits de notre personnalité qui nous déplaisent.
Cette façon d'agir est mise de l'avant à outrance par plusieurs êtres humains de notre ère, mais à force de camoufler notre vraie nature et de mentir à ceux que l'on aime, ne risque-t-on pas de payer encore plus cher leur déception ? Bien que nous tâchons tous d'améliorer certains aspects de notre personne, avoir recourt au port du masque simplement pour nous permettre pendant un bref moment d'être quelqu'un d'autre ne garantit pas le bonheur à long terme.
Sans contredit, rien n'est stable dans la vie : tout change à tout moment, tout s'écoule et même les montagnes, symboles de pérennité, se transforment imperceptiblement sous l'action ininterrompue de l'érosion. Ce qui est aussi le plus remarquable, contrairement à la nature humaine, c'est que dans ce mouvement chaque chose devient autre tout en restant cependant la même. Bien que nous sommes issus de l'état de nature et que nous sommes des créatures terrestres, nous ne nous transformons pas au fil des années en demeurant tout de même fidèles à notre personnalité singulière.
Ce que je suis et que je pense aujourd'hui n'implique pas nécessairement une constante tout au long de l'existence, c'est ce qu'indique à merveille la célèbre formule : « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve » (citée par Platon dans le Cratyle). Le fleuve dans lequel j'entre aujourd'hui est bien le même que celui dans lequel je suis entré hier, mais ses eaux depuis se sont renouvelées, faisant de lui un fleuve autre. L'être que je suis se renouvelle sans cesse, en puisant dans de nouvelles ressources un peu partout autour de lui, mais l'important c'est de ne jamais perdre de vue tout ce que l'on a reçu par la source originelle, puisqu'une des merveilles de l'être humain c'est sa singularité.
Les masques dansent sans cesse autour de nous, l'important c'est d'apprendre à se connaître en évitant de glisser dans le piège d'utiliser un masque différent en fonction de la personne ou de la situation que nous faisons face. Finalement, nous nous devons de respecter notre individualité. C'est ce qui fait la force de l'être humain, car bien qu'à la base nous sommes tous pareils, il n'y a pas deux êtres humains fondamentalement identiques; du moins pas encore...